Dans la ville de Chicago en 1980, Marc Smith, ouvrier du bâtiment et poète à ses heures perdues, insuffla vie au slam, un art qui depuis ma jeunesse m’a captivé. Le slam, tout comme le rap, est une forme de poésie. Ce qui les distingue réside dans leur intention et leur rythme singuliers. Tandis que le slam vise une expression poétique profonde, sans compromettre son sens, afin d’atteindre l’âme de ceux qui l’écoutent, le rap cherche davantage à divertir, à jouer avec les sonorités et à ambiancer son public.
C’est ainsi que lors de ma scolarité à l’Athénée Royal d’Ath, j’ai eu l’opportunité de plonger dans cet art au cours de français. Après avoir visionné en classe la performance live de Grand Corps Malade intitulée « Course contre la montre », nous avons été invités à rédiger un texte en réaction à cet événement.
Le slam, dans sa quête de vérité et d’émotion, transcende les simples mots pour devenir un véhicule puissant de partage et de connexion. Il m’a permis de découvrir comment les tournures poétiques, la musicalité des phrases et la profondeur des émotions pouvaient trouver leur place dans une forme artistique à part entière, offrant ainsi un espace pour exprimer des histoires authentiques et personnelles.
Le temps passe l’avenir trépasse, L’argent domine un monde dans lequel La famine prime et laisse des séquelles. Légère est la pauvreté sur la balance des classes Mais même avec absence y a pas assez de place. On pense beaucoup à ce qu’on dit On pense moins à ce qu’on fait On se croit dans une utopie Alors qu’on est tous fait. Comment reconstruire le monde Quand la société nous dévergonde ? Je vocifère mais les mots ne valent plus, Une faconde intarissable, une verbosité instoppable. On s’est battu et on s’est ébattu, Les mots ne suffisent plus. La parole est déchue, Certains sont déçus. Quand avant naissaient des élus Maintenant naissent des inconnus. Des gens au pouvoir À croire aléatoire Qui finissent par nous dicter Comment régler la société. Imagine petit, moi j’ai connu la pandémie, Imagine petit, moi j’ai connu la dystopi, Imagine petit, perdre l’envie d’quitter son lit, Imagine petit, une vie d’asphyxie. Faites tomber les masques Et humez la senteur enivrante, Une jeunesse fantasque Qui profite des étoiles filantes. | Le ciel se dégage, disparaissent les nuages, Après la pluie, le soleil Et après le soleil, des merveilles. Des merveilles qu’on fera voir à nos enfants Parce que d’ici là c’est le grand changement. On va chanter l’amour, Panser la terre, On va penser laboure Pour une nouvelle ère. Le temps passe l’avenir trépasse, Main dans la main enclenche le frein. Brillons si fort, plus que l’or, Pour réveiller les morts Qu’ils assistent à notre aurore. Le voile a brûlé, le masque est tombé, Les chaines sont brisées, le futur est né. Ouvrons les yeux, Faisons nos adieux au passé Pour un avenir radieux. |
Lors d’une visioconférence en classe avec l’écrivaine Zoé Derleyn, autrice de « Debout dans l’eau », mon professeur a partagé mon slam. Avec humilité, Zoé Derleyn a exprimé avoir été touchée par mon texte. Elle a confié qu’il avait résonné en elle, évoquant des émotions profondes, presque au bord des larmes. Elle a souligné sa capacité à comprendre le contenu, à s’y identifier et a loué sa beauté intrinsèque.